Une réponse législative aux tragédies du bâti dégradé

Le 5 novembre 2018, l’effondrement tragique de deux immeubles rue d’Aubagne à Marseille, causant la mort de huit personnes, a révélé au grand jour les défaillances du système de surveillance du bâti ancien. Cette catastrophe a mis en lumière la responsabilité partagée des propriétaires, syndics, et autorités publiques dans la prévention des risques structurels.

Face à ce drame et à d’autres incidents similaires, le législateur a réagi en créant un nouveau dispositif préventif : le diagnostic structurel obligatoire, instauré par la loi du 9 avril 2024 relative à l’habitat dégradé.

Décret d’application du 15 août 2025 : https://www.ecologie.gouv.fr/presse/decret-diagnostic-structurel-immeubles-collectifs-est-publie-nouvel-outil-prevenir

Présentation de la loi du 9 avril 2024

La loi « Habitat dégradé » introduit une obligation inédite de diagnostic structurel pour les immeubles collectifs situés dans des secteurs sensibles délimités par les communes. Cette mesure vise spécifiquement les zones d’habitat dégradé ou ancien, où les risques d’effondrement sont considérés comme plus élevés.

L’objectif est double : détecter précocement les désordres affectant la solidité des bâtiments et évaluer les risques pour la sécurité des occupants et des tiers. Cette approche préventive marque une évolution majeure dans la gestion du patrimoine immobilier collectif, en passant d’une logique curative à une logique anticipative des risques structurels.

Le processus du diagnostic structurel

Le dispositif s’articule autour d’un calendrier précis et de professionnels qualifiés. Tout immeuble d’habitation collectif situé dans un secteur délimité par la commune doit faire l’objet d’un diagnostic structurel dès 15 ans après la réception initiale des travaux, puis au minimum tous les 10 ans.

Ce diagnostic doit être réalisé par un professionnel disposant de garanties spécifiques de compétence et d’assurance. À l’issue de l’expertise, des propositions de travaux ou d’investigations complémentaires peuvent être formulées. Le propriétaire ou le syndicat de copropriété dispose de 18 mois pour transmettre ce diagnostic à la mairie. En cas de défaillance, la commune peut faire réaliser le diagnostic d’office, aux frais du défaillant, constituant ainsi un mécanisme coercitif efficace.

Diagnostic structurel vs Plan Pluriannuel de Travaux : deux outils complémentaires

Bien que ces deux dispositifs concernent l’entretien des immeubles collectifs, leurs objectifs et modalités diffèrent significativement.

Le diagnostic structurel se concentre exclusivement sur l’évaluation de la solidité et des risques structurels, dans des zones spécifiquement délimitées par les communes. Il constitue une obligation ciblée sur la sécurité immédiate des occupants.

Le Plan Pluriannuel de Travaux (PPT), obligatoire pour toutes les copropriétés de plus de 15 ans indépendamment de leur localisation, adopte une approche plus globale. Il planifie et budgétise l’ensemble des travaux d’entretien et d’amélioration sur 10 ans, incluant la performance énergétique et les économies d’énergie. Tandis que le diagnostic structurel se transmet à la commune, le PPT fait l’objet d’un vote en assemblée générale et d’un suivi par le syndic.

Découvrez l’article Orama sur la mise en oeuvre des PPT. 

Une passerelle existe cependant entre ces deux dispositifs : la réalisation d’un PPT conforme peut tenir lieu de diagnostic structurel, à condition que le professionnel réponde aux exigences de compétence et d’assurance fixées par la loi de 2024. Cette disposition évite la multiplication des diagnostics pour les copropriétés déjà engagées dans une démarche de planification des travaux.

En conclusion, la loi « Habitat dégradé » vient combler une faille majeure dans la prévention des risques liés à l’habitat collectif. Elle complète le dispositif du PPT en apportant une réponse ciblée sur la solidité des immeubles dans les zones les plus exposées, et redonne aux communes un pouvoir d’action essentiel pour lutter contre l’habitat indigne.