PTZ et bail emphytéotique : une première en France au service de l’accession
Dans un contexte de crise immobilière durable, marqué par l’écart croissant entre les prix du logement et les revenus des ménages, l’accès à la propriété devient de plus en plus difficile, en particulier pour les primo-accédants. Face à ce constat, les pouvoirs publics s’emploient à proposer des solutions structurelles, fondées sur de nouveaux montages juridiques et financiers.
Parmi ces approches, la dissociation entre le foncier et le bâti permet d’abaisser le coût d’entrée pour les acquéreurs. Différentes formules ont vu le jour, parmi lesquelles le bail réel solidaire (BRS) ou encore le bail emphytéotique. Ces dispositifs reposent sur un principe commun : rendre l’accession à la propriété plus accessible en optimisant la répartition des charges financières.
Dans ce cadre, une évolution notable est intervenue début avril 2025. La ministre du Logement, Valérie Létard, a annoncé au salon MIPIM 2025 la possibilité d’étendre le bénéfice du prêt à taux zéro (PTZ) à certaines formules d’acquisition reposant sur la dissociation foncier/bâti – dont celle développée par la start-up Néoproprio. Cette mesure, effective depuis le 1er avril 2025 avec la publication du décret n°2025-299 du 29 mars, permet désormais d’utiliser le PTZ pour l’achat d’une résidence principale dans le cadre d’un bail emphytéotique.
1. Néoproprio : un modèle d’accession à coût réduit reposant sur un bail emphytéotique
Portée par Xavier Lépine, ancien président de La Française, et Julien Denormandie, ancien ministre du Logement, la société Néoproprio propose une formule d’accession dite de « propriété temporaire » fondée sur un contrat de bail emphytéotique de 25 ans. Ce modèle permet à un ménage d’occuper un bien en résidence principale tout en acquérant un droit réel sur celui-ci, sans acheter le terrain.
Le schéma repose sur une acquisition partagée : l’acquéreur finance environ 50 % de la valeur du bien, l’autre part étant apportée par un fonds immobilier. Le ménage rembourse un crédit classique sur la fraction qu’il détient, et verse une redevance annuelle pour l’usage de la part restante. Le coût total d’occupation est comparable à un loyer, mais permet la constitution d’un capital et une meilleure visibilité financière à terme.
Plusieurs garanties sont prévues :
- une option de rachat anticipé à tout moment,
- une valeur de sortie définie contractuellement,
- la participation à une éventuelle plus-value en cas de revente.
Le montage attire également les investisseurs institutionnels, qui trouvent dans cette formule un équilibre entre rendement stable et transfert de la gestion du bien à l’occupant. Voir l’interview du fondateur de Néoproprio

2. Le bail emphytéotique : un outil juridique ancien, adapté aux besoins actuels
Le bail emphytéotique est un contrat de longue durée, pouvant aller jusqu’à 99 ans, qui confère à son titulaire un droit réel lui permettant d’utiliser un bien de manière quasi-permanente. L’occupant peut y effectuer des travaux, souscrire un emprunt ou encore mettre le bien en location, sous réserve de respecter ses obligations contractuelles. Il assume l’ensemble des charges afférentes au bien, y compris fiscales.
Historiquement utilisé dans le cadre de projets agricoles ou publics, ce type de bail connaît un regain d’intérêt pour les opérations d’accession à la propriété à moindre coût. Il permet une occupation stable du logement sur une période longue, tout en limitant le coût d’acquisition initial. Dans les montages récents, il s’inscrit dans une stratégie visant à faciliter l’installation durable des ménages dans des zones tendues ou à fort potentiel de revalorisation.
3. Le prêt à taux zéro : un levier public adapté à cette nouvelle configuration
Le prêt à taux zéro, réservé aux primo-accédants sous conditions de ressources, constitue un soutien important pour l’acquisition d’une résidence principale. Réformé par la loi de finances 2025, il est désormais accessible sur l’ensemble du territoire, y compris pour les logements neufs situés hors des zones dites tendues.
Ce prêt sans intérêt, pouvant aller jusqu’à 40 % du coût du projet, est destiné à compléter un financement principal. Il permet de lisser l’effort financier des ménages sur une durée pouvant aller jusqu’à 25 ans, avec un différé de remboursement variable selon les revenus.
Depuis le 1er avril 2025, ce prêt est désormais mobilisable pour des projets d’accession réalisés dans le cadre d’un bail emphytéotique. Cette nouveauté, introduite par décret, permet d’élargir le champ d’application du PTZ à des formules alternatives d’acquisition, à condition que le logement constitue bien la résidence principale et que l’opération respecte les critères réglementaires en vigueur. En savoir plus sur le site du Gouvernement

4. Une évolution structurante pour l’offre de logements abordables
L’extension du PTZ à ces montages fondés sur la dissociation entre usage et propriété constitue une évolution notable du cadre réglementaire de l’accession. Elle reflète une volonté des pouvoirs publics d’accompagner les changements dans les pratiques immobilières, en particulier l’émergence de solutions hybrides adaptées aux contraintes économiques des ménages.
Ce type de mesure s’inscrit dans une politique plus large de soutien à l’accession sociale, qui vise à répondre à la baisse de la construction neuve et à la raréfaction du foncier accessible. Il ouvre également la voie à de nouveaux partenariats entre opérateurs privés, collectivités locales et investisseurs institutionnels, autour d’offres d’habitat plus flexibles et sécurisées.